Jean Aicardi
Septième d’une
fratrie de neuf, Jean François Marie Aicardi voit le jour le 8 novembre 1926 à
Rambouillet. Son père, ancien officier de marine, qui a développé un intérêt
pour la radiographie après la première guerre mondiale, est devenu ingénieur
pour subvenir aux besoins de sa grande progéniture, dont son épouse est en
charge à domicile. Au lycée Hoche de Versailles, Jean n’excelle guerre, en
particulier en mathématiques ; seule la Biologie attise sa curiosité, mais
est d’après lui trop peu approfondie. Sans prétention aucune, et sans savoir
dans quoi il se lance, il s’inscrit ainsi à la Faculté de Médecine de Paris. L’année
préparatoire, avec son lot de physique, de chimie et de biologie, puis les deux
premières années de médecine, sont une révélation : travaillant sans relâche,
Aicardi se prépare au concours de l’externat. Il n’assiste que rarement aux
cours magistraux qui sont en compétition avec ses révisions, exceptés les cours
de certains professeurs ou les cours portant sur un sujet particulièrement
intéressant (89). Reçu, il est externe dans le service du non moins célèbre Professeur
Raymond Garcin, neurologue à la Salpêtrière ; c’est là que naît son attirance
pour la neurologie. Il se présente, en 1951, au concours de l’internat (90), dont il trouve la phase préparatoire à la fois « captivante et
fastidieuse », le laissant « avec une connaissance fragmentaire, faisant
penser à un archipel dans un océan d’ignorance » (89). Les quatre années d’internat, où il retourne avec plaisir dans le service
de Garcin, et où les échanges avec ses séniors sont pour lui plus enrichissantes
que les enseignements de la Faculté, le conduisent à se spécialiser à la fois
en pédiatrie, son vœu le plus cher, et en neurologie. Il obtient par chance un
poste dans l’unité de Stéphane Thieffry à l’Hôpital des Enfants Malades, développée
dès le début des années cinquante à l’initiative du Professeur Robert Debré, et
orientée vers les troubles neurologiques de l’enfant (et notamment la poliomyélite)
(89). Aicardi soutient sa thèse d’exercice en 1955, portant sur les
convulsions dans la première année de vie.
Après l’internat, il
échoue à obtenir un poste plus élevé dans les Hôpitaux de Paris, la neurologie pédiatrique
n’étant que sous-représentée dans les jurys de Concours. Afin de pouvoir rester
proche de l’unité Thieffry, Aicardi accepte un poste de Médecin Assistant en
chirurgie…fort heureusement, son travail en chirurgie n’étant pas trop exigeant,
il parvient à continuer de façon très officieuse à participer aux soins et à l’enseignement
en pédiatrie. En outre, il travaille en dispensaire pour pouvoir faire vivre
correctement son épouse, Jeanne, avec qui il réside Boulevard Beaumarchais (et
avec qui il n’aura pas d’enfant) (89,90).
Comme l’unité
Thieffry est reconnue internationalement, Aicardi est invité à travailler de
1955 à 1956 au Boston Children’s Hospital,
où il rencontre Randolph Byers et Cesare Lombroso. En rentrant, il développe
des contacts avec d’autres pays, comme l’Angleterre, et est l’invité de réunions
à l’Oxford College.
De 1964 à 1979, l’unité
Thieffry déménage à l’Hôpital Saint Vincent de Paul, suite à la nomination de
Thieffry comme Professeur (ce dernier devant exercer dans un hôpital disposant
d’un poste vacant de Médecin Chef). Aicardi obtient un poste, non rémunéré, d’assistant
non officiel, qu’il tient quatre années durant, côtoyant entre autres
Jean-Jacques Chevrie, chercheur à l’INSERM spécialisé dans l’épilepsie, et
Françoise Goutières (avec laquelle il décrira le syndrome d’Aicardi-Goutières).
Enfin, il est nommé directeur de recherches pour l’unité Thieffry, et avec des
revenus stables et deux collaborateurs, parvient se consacrer entièrement à la
clinique et à la rédaction de ses innombrables articles et ouvrages médicaux (90).
Grâce à Henri
Gastaut, venu à Paris faire une lecture sur l’épilepsie, et à Jean Bancaud, qui
crée une rencontre mensuelle « Epiclub » avec les médecins parisiens intéressés
par l’épilepsie, Aicardi se penche de plus en plus sur le sujet. Il étudie les
crises fébriles de l’enfant (91), les états de mal épileptiques (92) ; il décrit le syndrome éponyme d’Aicardi, contribue à la
description du syndrome de Rett, s’intéresse à la dénomination du syndrome de
Lennox (93). Avec Epiclub, il décrit les différents types de crises épileptiques,
développe de nouveaux concepts comme le concept de « syndrome épileptique »,
ou d’ « épilepsie bénigne de l’enfance » (89).
En 1991, âgé de soixante-cinq
ans, et alors que le système français exige sa retraite, Jean Aicardi est nommé
consultant honoraire de l’Hospital for
sick children Great Ormond Street, et Professeur Honoraire de l’Institute for Child Health de Londres. Durant
ses dernières années de vie, il sera chercheur invité à Miami.
Membre de la Société
Européenne de Neurologie Pédiatrique, de l’International
Child Neurology Association, titulaire d’un Hower Award de la Child
Epilepsy Society en 1986, d’un Epilepsy
Research Award de l’American Epilepsy
Society en 1995, Aicardi est aussi le fondateur de la revue médicale Epileptic Disorders (et son rédacteur en
chef de 1994 à 2004), et Chevalier de la Légion d’Honneur depuis 2009 (90).
Il décède le 3 août
2015 à Paris.
Références
89. Aicardi
J. Jean Aicardi: my circuitous path to becoming a French child neurologist and
epileptologist. J Child Neurol. 2013 Mar;28(3):409–15.
90. Stephenson
JBP. In Memoriam: Professor Jean Aicardi (1926-2015). Pediatr Neurol. 2016
Jan;54:3–4.
91. Aicardi
J. [Febrile convulsions in children]. Arch Fr Pediatr. 1972 Jan;29(1):5–9.
92. Aicardi
J, Chevrie JJ. Convulsive status epilepticus in infants and children. A study
of 239 cases. Epilepsia. 1970 Jun;11(2):187–97.
93. Aicardi
J. The Problem of the Lennox Syndrome. Dev Med Child Neurol. 1973;15(1):77–81.
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